La pharmacie clinique présentée à vos collègues médecins

ORION PHARMA conscient de l’importance des actions du pharmacien hospitalier dans l’optimisation de la prise en charge a souhaité apporter sa contribution en réalisant avec l’aide de Thibaut Caruba une vidéo destinée à être partagée avec vos collègues médecins ou instances administratives qui souhaitent en savoir plus sur les différentes facettes de la profession de pharmacien clinicien.

 

 

Interview du 22 avril 2021

Bonjour je m’appelle Thibaut Caruba, je suis pharmacien hospitalier à l’Hôpital Européen Georges Pompidou, spécialisé en pharmacie clinique avec une orientation sur les services de cardiologie.

Je vais vous parler dans cette première partie de la pharmacie clinique en vous donnant sa définition, ses objectifs et son cadre réglementaire. Je vous présenterai également la partie enseignement et pédagogie associée à cette spécialité.

La définition de la pharmacie clinique la plus récente est celle donnée par la société savante qui s’appelle Société Française de Pharmacie Clinique en 2016, cette définition est la suivante : la pharmacie clinique est une discipline de santé centrée sur le patient, elle a pour objectif d’optimiser la thérapeutique à chaque étape du parcours de soin.(1,2,3)
Les actes de pharmacie clinique contribuant à la prise en charge du patient vont permettre la sécurisation, la pertinence et l’efficience du recours aux produits de santé.

Le pharmacien exerce cette spécialité en collaboration avec les autres professionnels de santé impliqués, mais aussi avec le patient et ses aidants.

Dans cette définition, 3 actes de pharmacie clinique sont décrits :

  • la dispensation des produits de santé,
  • le bilan de médication,
  • le plan pharmaceutique personnalisé.

La dispensation des produits de santé : l’analyse pharmaceutique garante du bon usage

La dispensation des produits de santé est l’analyse pharmaceutique de l’ordonnance ou de la demande du patient. Elle va être accompagnée de conseils et d’informations pour permettre le bon usage du médicament. À cette étape le pharmacien n’a généralement accès qu’à très peu de données concernant les paramètres cliniques et biologiques du patient.

Le bilan de médication : une intervention pharmaceutique basée sur une analyse exhaustive des données patients

Dans cet exercice, le pharmacien va analyser l’ordonnance en s’appuyant sur les données cliniques, biologiques et toutes les informations paramédicales mises à sa disposition dans le dossier médical. Il va s’appuyer également sur des données de conciliation médicamenteuse, si elles sont disponibles. Le pharmacien réalise alors une synthèse appelée avis pharmaceutique qui va être associé au dossier du patient et consultable par tous les autres professionnels de santé. Si le pharmacien détecte des points d’amélioration pour garantir la sécurisation et l’optimisation de la prise en charge, il fait des interventions pharmaceutiques. Elles sont variées, telles que :

  • des détections d’interactions médicamenteuses qui nécessitent une modification des prescriptions ;
  • des adaptations de posologie par rapport à la clairance de la créatinine ;
  • la transmission d’informations, par exemple sur une antibiothérapie trop longue et en désaccord avec les recommandations comme celles de la Société de Pathologie Infectieuse de Langue Française ;
  • elles peuvent également être destinées à l’équipe paramédicale, comme des informations sur des compatibilités, des durées d’administration pour des perfusions.

Ce bilan de médication va être fait de manière d’autant plus pertinente si le pharmacien :

  • a accès à des données exhaustives concernant le patient,
  • est à l’aise avec les recommandations en vigueur dans la spécialité où il s’implique,
  • participe à la visite médicale, à la vie du service, lui permettant ainsi d’interagir avec l’ensemble de l’équipe soignante, c’est à dire prescripteurs et paramédicaux.

Lors du bilan de médication, le pharmacien peut également faire une consultation avec le patient pour transmettre des messages de conseils, de prévention et d’éducation.

Le plan pharmaceutique personnalisé : un accompagnement sur-mesure dans le cadre d’une démarche multidisciplinaire

Troisième acte de pharmacie clinique, le plan pharmaceutique personnalisé est un entretien pharmaceutique avec le patient.

Il est nécessaire d’identifier les patients qui peuvent bénéficier de cet entretien pharmaceutique. Il se fait en général soit à la demande du service (i.e. : de l’équipe soignante), soit parce que le pharmacien, lors de l’analyse de l’ordonnance, aura remarqué, détecté un point d’amélioration nécessitant une discussion avec le patient.

Avant de réaliser cet entretien, il est important de discuter avec l’équipe soignante pour définir les objectifs.

Premier objectif, on peut imaginer un entretien ciblant une seule classe thérapeutique, c’est à dire qu’il y aura la prescription d’un médicament jugé à risque comme classiquement les anticoagulants. Dans ce cas, le pharmacien pourra être sollicité pour expliquer les bénéfices et les risques de ce traitement au patient.

Deuxième type d’entretien, il peut s’agir d‘un entretien ayant pour but d’évaluer l’observance du patient.

Un troisième type d’entretien peut être un entretien s’intégrant dans un programme d’éducation thérapeutique. Le patient discutera alors avec le pharmacien et rencontrera également d’autres professionnels de santé où chacun apportera sa contribution pour optimiser la prise en charge du patient.

Un cadre règlementaire précis

La pharmacie clinique est encadrée par des textes réglementaires.(3,4,5)

Quand elle est exercée par le pharmacien d’officine, le principal texte réglementaire est une convention nationale signée entre l’Assurance Maladie et les pharmaciens d’officine.

Cette convention nationale a permis et encouragé les pharmaciens à faire des entretiens en ciblant deux populations : les patients traités par antivitaminique K et les patients asthmatiques. Depuis 2018, les pharmaciens d’officine sont encouragés à faire des bilans partagés de médication en ciblant cette fois-ci deux autres populations qui sont les patients de plus de 65 ans souffrant d’une affection longue durée et, les patients de plus de 75 ans avec plus de 5 médicaments prescrits sur l’ordonnance. Dans ces cas, le pharmacien se retrouve à coordonner, à faire de l’éducation et des entretiens avec le patient dans le but de transmettre des informations aux prescripteurs via les messageries sécurisées.

Concernant le pharmacien hospitalier, le principal texte est une ordonnance de 2016 qui introduit réglementairement la pharmacie clinique dans les missions du pharmacien hospitalier.(3,6) Ce texte reprend la définition donnée par la Société Française de Pharmacie Clinique en disant que le pharmacien qui exerce en pharmacie à usage intérieur doit mener des opérations de pharmacie clinique pour contribuer à la sécurisation, à la pertinence et à l’efficience du recours des produits de santé. Il doit concourir à l’amélioration de la qualité des soins et surtout travailler en collaboration avec les autres membres de l’équipe de soins et également associer le patient.

La formation à la pharmacie clinique : une place à part entière dans le cursus universitaire

En termes de formation, la pharmacie clinique est intégrée dans l’enseignement des études de pharmacie avec deux choses essentielles à savoir :

  • tous les étudiants en pharmacie exercent leur cinquième année en année hospitalo-universitaire, c’est-à-dire une année d’externat. C’est une année très importante puisqu’ils vont travailler à l’hôpital dans les services cliniques et voir le raisonnement médical, du diagnostic jusqu’à la prise en charge. Cela permet aux étudiants de participer à la visite médicale, de participer - en étant encadrés par les pharmaciens seniors - à l’analyse pharmaceutique des ordonnances et également aux entretiens pharmaceutiques.
  • La deuxième chose importante est que, dernièrement, la formation initiale en éducation thérapeutique a été intégrée dans l’enseignement théorique pour tous les étudiants en pharmacie. Cette formation représente un volume de 40 heures.

Les étudiants en pharmacie, qui passent le concours de l’internat et qui suivent le DES de pharmacie hospitalière, doivent faire au moins un semestre de pharmacie clinique. En pratique, de très nombreux internes multiplient les stages en pharmacie clinique soit pour consolider, soit pour diversifier, leurs connaissances en passant dans des services dédiés (i.e. : en pédiatrie, en cancérologie, etc.).
En parallèle, pour tous les pharmaciens diplômés ou en cours de formation, il existe des diplômes universitaires dans la même dynamique pour se spécialiser ou pour diversifier les savoirs.

La pharmacie clinique : une activité de plus en plus répandue

Est-ce que c’est une activité répandue à l’échelle nationale ? La réponse est plutôt oui, c’est répandu aussi bien à l’officine qu’à l’hôpital. Elle est surtout favorisée par l’existence et le déploiement des outils numériques qui permettent d’échanger entres les professionnels de santé et d’avoir accès aux informations cliniques et biologiques du patient.

Il faut garder à l’esprit que c’est une activité qui est chronophage et qui n’est pas généralisable à tous les patients. Il faut à chaque fois réfléchir au circuit. La mise en place d’une consultation pharmaceutique ou de l’activité d’analyse pharmaceutique des ordonnances, peut se faire en fonction de l’organisation, et/ou en fonction des médicaments à risque et/ou en fonction des profils des patients.

  1. https://sfpc.eu/
  2. B. Allenet et al. De la dispensation au plan pharmaceutique personnalisé : vers un modèle intégratif de pharmacie clinique. Le Pharmacien Hospitalier et Clinicien 2019;54:5
  3. Cahiers de l’Ordre des Pharmaciens : la Pharmacie clinique 2018. http://www.ordre.pharmacien.fr/content/download/429903/2024829
  4. Arrêté du 4 mai 2012 portant approbation de la convention nationale organisant les rapports entre les pharmaciens titulaires d’officine et l’assurance maladie
  5. Arrêté du 24 juin 2013 portant approbation de l’avenant n°1 à la convention nationale du 4 avril 2012, organisant les rapports entre les pharmaciens titulaires d’officine et l’assurance maladie relatif à l’accompagnement des patients chroniques sous anticoagulants oraux
  6. Ordonnance 2016-1729 du 15/12/2016 /

Déclaration d’intérêts :
TC a reçu des honoraires d’Orion Pharma France pour des réunions d’expertise sur l’insuffisance cardiaque.